Les barons de l’immobilier… choyés plus qu’il n’en faut, par Abdallah Damoune
11 juin 2013 23:08 5 commentaires
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[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Ces dernières années, de nombreuses zones du pays ont été livrées à une destruction méthodique de la part de certains géants de l’immobilier qui avaient disposé de grandes surfaces de terrains, gratuitement ou presque, aux fins d’y construire des cages de poules pour des gens que l’on suppose avoir des valeurs et même une dignité. Mais, au final, ces grands groupes ont échoué sur toute la ligne, au point qu’un juge, honnête bien sûr, mais que son statut empêche de vivre dans une zone populaire, n’a pu acheter un logement intermédiaire en raison du fait que ces grands promoteurs ont divisé le marché en maisons très chères et en appartements lilliputiens ne garantissant pas le seuil minimum de dignité à leurs occupants.
Les grands projets immobiliers sont apparus au Maroc depuis de longues années, et grâce à cela, plusieurs barons de l’immobilier ont engrangé des bénéfices que n’égalent même pas ceux réalisés par les trafiquants de drogue de la région de Ketama. Avec ces projets, il était prévu que la crise du logement prenne fin, enfin, ou presque. Las… voilà l’Etat arrive et déclare que tous ses programmes immobiliers ont échoué, avant qu’il ne se plonge dans une réflexion sur ce qu’il s’agit de faire dans les années à venir.
L’Etat, donc, avait accordé des terrains gratuitement, ou presque, à de célèbres groupes immobiliers, qui ont eu la jouissance en plus d’avantages et privilèges fiscaux sans limites. Grâce à cette politique, ces entrepreneurs ont amassé une fortune à côté de laquelle celle de Crésus aurait fait pâle figure. Mais quand tout cela s’est révélé inutile à résorber la crise du chômage dans ce pays, personne n’a songé à aller demander des comptes à ceux-là qui sont devenus milliardaires du jour au lendemain, alors même que les Marocains continuent de s’empresser de donner leur pécule aux caïds, moqaddem, élus et chefs d’arrondissement pour qu’ils aient la possibilité de bâtir des logements clandestins ici et là.
Dans de nombreux endroits, ces bêtes de l’immobilier ont bâti des projets navrants en bord de fleuves, affligeants sur des canaux d’assainissement ou encore, consternants à flancs de collines qui menacent de s’effondrer. Ailleurs, des lits d’oueds ont été comblés pour offrir la surface nécessaire à la construction d’ensembles immobiliers. Et malgré cela, personne ne bouge… absolument personne.
Seuls ceux qui ont l’habitude de s’activer s’activent encore et encore : ainsi, voici quelques jours, des promoteurs immobiliers ont présenté une demande à l’Etat pour qu’il leur octroie des terrains constructibles, à 100 DH/m², afin qu’ils y érigent leurs nouveaux projets… Comme si tous les privilèges qu’il leur est arrivé de recevoir dans le passé ne suffisaient pas.
Le problème est que ces terrains demandés par les promoteurs ne sont pas la propriété de l’Etat, mais de la population, et les pouvoirs publics sont uniquement chargés de leur gestion, dans l’intérêt général. Il n’appartient donc aucunement à l’Etat d’en gratifier des promoteurs qui ont échoué en tout, sauf à amasser des fortunes, et à demander encore plus, toujours plus.
S’il y a bien des gens qui devraient profiter de ces terrains à 100 DH/m², ce sont ces gens de conditions modestes qui rêvent d’acquérir, un jour, un logement décent, ceux-là mêmes qui se trouvent devant une seule alternative : le logement clandestin pour l’acquisition duquel ils versent des pots-de-vin, ou le logement sauvage, proposé par les barons de l’immobilier, et contre lequel les gens versent l’épargne de toute une vie.
Et pourtant… L’Etat peut offrir la possibilité aux citoyens de s’organiser en coopératives ou associations qui seraient chargées de construire des projets immobiliers en collectivité, qui procureraient de vrais logements et non des boîtes d’allumettes qui se transforment en frigo l’hiver et en enfer l’été. Il est du droit des gens de pouvoir choisir où ils souhaitent vivre, et il n’appartient à personne de les amasser dans des ghettos qui ressemblent à des camps pour réfugiés.
Autre chose… Lors de la récente visite au Maroc du premier ministre turc Erdogan, les promoteurs immobiliers ont montré leur crainte d’ouvrir les portes du Maroc à leurs pairs anatoliens désireux d’investir sur nos terres. Nos promoteurs ont-ils donc peur que ces projets turcs puissent s’effondrer sur leurs résidents ? Appréhendent-ils le fait que les Turcs puissent construire des logements de mauvaise facture, portant atteinte à la dignité de leurs futurs acquéreurs ? Pensent-ils donc que les Turcs proposeraient des prix astronomiques pour leurs produits ? Non, pas du tout, absolument pas… Ces gens-là craignent tout simplement la concurrence, en vertu de laquelle les Marocains pourront opérer un choix entre les différents logements qui leur seraient proposés, en fonction de leurs moyens, et c’est bien la raison pour laquelle ceux qui engrangent les fortunes nourrissent des craintes pour leurs profits. Et, à ce propos, puisque les Marocains achètent des voitures françaises, italiennes ou allemandes, puisqu’ils boivent des sodas américains ou anglais, puisqu’ils mènent leurs enfants dans des écoles de toutes nationalités et qu’ils portent des vêtements venus de toutes parts, tout en mangeant des bananes brésiliennes, du fromage français, des pommes suisses et des oranges espagnoles, pourquoi devraient-ils n’habiter que dans des logements marocains ? Pourquoi donc la concurrence est interdite uniquement dans le secteur de l’immobilier ? Non, la concurrence doit être générale, ou ne pas être…
Et, au-dessus de tout cela, l’Etat a déclaré officiellement l’échec des promoteurs immobiliers marocains… et encore plus au-dessus, personne ne demande des comptes à ces gens, dont aucun ne se trouve aujourd’hui derrière les barreaux. N’est-ce pas suffisant pour qu’ils se sentent choyés plus qu’il n’en faut ?